Page:Anatole France - Le Jardin d’Épicure.djvu/191

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encore aujourd’hui. Car je n’appelle pas vivre flotter comme une vaine ombre dans la poussière des bibliothèques et apparaître vaguement à M. Ernest Renan ou à M. Philippe Berger. Et cet état de fantôme me semble d’autant plus triste que j’ai mené, de mon vivant, l’existence la plus active et la mieux remplie. Je ne m’amusais point à semer dans les champs béotiens des dents de serpent, à moins que ces dents ne fussent les haines et l’envie que faisaient naître dans l’âme des pâtres du Cythéron ma richesse et ma puissance. J’ai navigué toute ma vie. Dans mon vaisseau noir, qui portait à sa proue un nain rouge et monstrueux, gardien de mes trésors, observant les sept Cabires qui voguent par le ciel en leur