Elle disait :
— Je le vois ! je le vois ! Qu’il est pâle ! Le sang s’échappe à flots de sa bouche, ses dents et ses mâchoires sont brisées. Louanges, louanges à Dieu ! le buveur de sang ne boira plus que le sien !…
En achevant ces paroles, qu’elle prononçait sur une étrange mélopée, elle poussa un cri d’horreur et tomba à la renverse. Elle avait perdu connaissance.
À ce moment même, dans la salle du conseil de l’Hôtel de ville, Robespierre recevait le coup de pistolet qui lui brisa la mâchoire et mit fin à la Terreur.
Ma grand’mère, qui était un esprit fort, croyait fermement à cette vision.
— Comment expliquez-vous cela ?
— Je l’explique en faisant remarquer que ma grand’mère, pour esprit fort qu’elle était, croyait assez au diable et au loup-garou. Jeune, toute cette sorcellerie l’amusait, et elle était, comme on dit, une grande faiseuse d’almanachs. Plus tard, elle prit peur du diable ; mais il était trop tard : il la tenait, elle ne pouvait plus n’y pas croire.