Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/336

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arrangeaient leur après-midi pour y mettre l’infini de la joie profonde et du plaisir ingénieux. Elle le consultait sur ses toilettes. Elle ne se décidait pas à le quitter, heureuse d’aller avec lui par les rues qu’emplissaient le soleil et la gaieté de midi. Arrivés à l’avenue des Ternes, ils découvrirent devant eux, sur l’avenue, des boutiques étalant côte à côte, à l’envi, une abondance magnifique de vivres. C’étaient des chapelets de volailles à la porte du rôtisseur et, chez le fruitier, des caisses d’abricots et de pêches, des paniers de raisin, des tas de poires. Des voitures de fruits et de fleurs bordaient la chaussée. Sous l’auvent vitré d’un restaurant, des hommes et des femmes déjeunaient. Thérèse reconnut parmi eux, seul à une petite table, contre un laurier en caisse, Choulette qui allumait sa pipe.

L’ayant vue, il jeta superbement une pièce de cent sous sur la table, se leva, salua. Il était très grave ; sa longue redingote lui donnait un air de décence et d’austérité.

Il dit qu’il aurait bien voulu aller voir madame Martin à Dinard. Mais il avait été retenu en Vendée, auprès de la marquise de Rieu. Cependant, il avait donné une nouvelle édition du Jardin clos, augmentée du Verger de Sainte-Claire. Il avait touché des âmes qu’on eût cru