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Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/380

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toute faculté humaine. C’est bien votre avis, n’est-ce pas, général ?

Le général Larivière cligna de l’œil.

— La situation, dit-il, exige une grande circonspection. Nous sommes en face d’un inconnu redoutable.

Alors Loyer, regardant son collègue de la Guerre avec un mépris cynique et doux :

— Dans le cas très improbable d’une guerre, ne pensez-vous pas, mon cher collègue, que les vrais généraux, ce seraient les chefs de gare ?

Les trois ministres sortirent par l’escalier de l’administration. Le Président du Conseil les attendait chez lui.

Le dernier acte commençait ; madame Martin n’avait plus dans sa loge que Dechartre avec miss Bell.

Miss Bell disait :

— Je suis réjouie, darling, — comment dites-vous en français ? — je suis exaltée en pensant que vous portez sur le cœur le lys rouge de Florence. Et M. Dechartre, qui a une âme artiste, doit être bien content aussi de voir à votre corsage ce gentil joyau. Oh ! je voudrais connaître le joaillier qui l’a fait, darling. Ce lys est svelte et souple comme la fleur d’iris. Oh ! il est élégant, magnifique et cruel. Avez-vous remarqué, my love, que les beaux joyaux ont un air de magnifique cruauté ?