en partant le mot qu’il faut dire. D’habitude, il la quittait court, comme si les choses n’avaient pas en lui de prolongements. À chacune de ces séparations, elle avait le sentiment confus d’une rupture. Elle en souffrait à l’avance, et devenait irritable.
Sous les arbres du Cours-la-Reine, il lui prit la main, la baisa à petits coups.
— N’est-ce pas, Thérèse, que c’est rare de s’aimer comme nous nous aimons ?
— Rare, je ne sais pas ; mais je crois que vous m’aimez.
— Et vous ?
— Moi aussi je vous aime.
— Et vous m’aimerez toujours ?
— Que sait-on jamais ?
Et, voyant le visage de son ami s’assombrir :
— Seriez-vous plus tranquille avec une femme qui jurerait de n’aimer que vous toute la vie ?
Il restait inquiet, l’air malheureux. Elle fut bonne, et le rassura tout à fait :
— Vous le savez bien, mon ami, je ne suis pas légère. Je ne suis pas une gâcheuse, comme la princesse Seniavine.
Presque au bout du Cours-la-Reine, ils se dirent adieu, sous les arbres. Il garda la voiture pour se faire mettre rue Royale. Il dînait au cercle et allait au théâtre. Il n’avait pas de temps à perdre.