Page:Anatole France - Le Lys rouge.djvu/79

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loin. Le lit, les lilas dans le cornet de cristal, la petite coupe de verre de Bohême où elle trouvait ses épingles, elle voyait tout comme par une fenêtre, quand on passe dans la rue. Elle était sans amertume, et même sans tristesse. Elle n’avait rien à pardonner, hélas ! Cette absence d’une semaine, ce n’était pas une trahison, ce n’était pas une faute contre elle, ce n’était rien, c’était tout. C’était la fin. Elle le savait. Elle voulait rompre. Elle le voulait comme la pierre qui tombe veut tomber. C’était un consentement à toutes les forces secrètes de son être et de la nature. Elle se disait : « Je n’ai pas de raisons de l’aimer moins. Est-ce que je ne l’aime plus ? L’ai-je jamais aimé ? » Elle ne savait pas et il lui était indifférent de savoir.

Trois ans pendant lesquels elle s’était donnée deux et quatre fois par semaine. Il y avait des mois où ils s’étaient vus tous les jours. Ce n’était donc rien que cela ? Mais la vie ce n’est pas grand’chose. Et ce qu’on met dedans, ce que c’est peu !

Enfin elle n’avait pas à se plaindre. Mais il valait mieux en finir. Toutes ses réflexions la ramenaient là. Ce n’était pas une résolution ; les résolutions on en change. C’était plus grave : c’était un état de la chair et de la pensée.

Arrivée à la place dont le milieu est rempli