Page:Anatole France - Le Mannequin d’osier.djvu/302

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madame Bergeret coupable les deux balais de la maison, dont l’un avait perdu la moitié de ses crins et l’autre, plus ancien, n’en avait pas plus que le creux de la main. Il servait à laver avec un torchon le carreau de la cuisine. Mais que le maître gardât une longue et muette rancune, c’est ce que la jeune paysanne jugeait odieux, contre nature et vraiment diabolique. Et ce qui faisait sentir plus vivement à Euphémie les torts de M. Bergeret, c’est que sa conduite rendait le service difficile et compliqué. Il fallait servir d’une part M. Bergeret qui ne voulait plus prendre ses repas avec madame Bergeret et, d’une autre part, madame Bergeret dont l’existence, obstinément niée par M. Bergeret, ne se soutenait pas toutefois sans nourriture. « C’est comme à l’auberge, soupirait la jeune Euphémie. » Madame Bergeret, à qui M. Bergeret ne donnait plus d’argent, disait : « Vous réglerez avec monsieur. » Euphémie portait en tremblant, le