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Ce pèlerinage ne serait rien, ne produirait rien, il ne serait qu’un geste banal, si, au bout de ce geste, on ne voyait luire un glaive ? Quel sera ce glaive ?

Celui-là même qui remet entre nos mains la Constitution de notre pays, cette Constitution dont nous sommes, selon le désir de Léon XIII, les observateurs très soumis. C’est le glaive électoral, qui sépare les bons des méchants. La Constitution nous donne le droit de nous en servir : la religion nous en fait un devoir. Bientôt la bataille va s’engager. Eh bien ! sachez-le, il n’y aura à présenter, aux élections prochaines, d’un bout à l’autre du territoire que deux candidats : Jésus-Christ et Barabbas, Jésus-Christ dans la personne des chrétiens, ou, à leur défaut, des partisans de la liberté chrétienne ; et Barabbas sous différents noms : Barabbas, l’anticlérical ; Barabbas, le franc-maçon ; Barabbas, le révolutionnaire ; Barabbas, l’anarchiste ; Barabbas, le communard ! Allez-vous voter pour Barabbas ?

Non, n’est-ce pas, mille fois non ! Ce serait sanctionner les lois impies qui bientôt crucifieraient le Sauveur. Non, vous ne le crucifierez pas vous-mêmes ce Roi bien aimé, et vous ne le laisserez pas crucifier par les autres. On vous le présentera revêtu de la pourpre d’ironie dont l’affubla Pilate. Mais vous l’en délivrerez et vous jetterez sur ses épaules le manteau de la souveraineté législative de la France. Emportez d’ici un programme électoral et qu’il tienne tout entier dans ce mot : « Nous voterons pour N. S. Jésus-Christ, et nous le ferons passer, et nous le ferons triompher ! » Vous voulez le faire Roi, messieurs, faites-en d’abord un législateur.

À la bataille sous l’égide de saint Michel ! C’est l’ange gardien de la patrie, c’est l’ennemi de la Révo-