Aller au contenu

Page:Anatole France - Le Petit Pierre.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vant pas se boutonner, s’ouvrait inglorieusement sur le ventre.

— La situation est terrible, nous dit-il, Paris en feu, ses rues hérissées de sept cents barricades, le peuple assiège le château que le maréchal Bugeaud défend avec quatre mille hommes et six pièces de canon.

Ces nouvelles furent accueillies par de grands mouvements de terreur et de pitié. La vieille Mélanie, à l’écart, faisait des signes de croix et remuait les lèvres en silence.

Ma mère fit servir du vin de Madère et des gâteaux secs. (En ce temps-là, on ne buvait guère de thé et les dames craignaient moins le vin qu’à présent.) Un doigt de vin de Madère anima les regards, fit sourire les lèvres. Ce n’étaient plus les mêmes visages ; ce n’étaient plus les mêmes âmes.

Pendant le goûter, M. Clérot, l’encadreur du quai Malaquais, se présenta devant nous. C’était un très gros homme, bien plus gros que M. Caumont, et que sa blouse blanche faisait paraître encore plus rond. Il salua la compagnie et demanda le secours du docteur Nozière pour les blessés du Palais-Royal, qui manquaient de tout. Ma mère lui répondit que