Page:Anatole France - Le Petit Pierre.djvu/143

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deux enfants en bas-âge, le comte de Paris et le duc de Chartres, et suivie de quelques familiers, à la Chambre des députés où elle se fit annoncer comme mère du nouveau roi et régente du royaume. Un groupe de républicains entra tumultueusement dans la salle en même temps qu’elle. Debout au pied de la tribune et tenant ses deux enfants par la main, elle attendait que l’assemblée consacrât ses pouvoirs. Les applaudissements qui avaient accueilli son entrée s’apaisèrent vite. La majorité n’était pas favorable à une régence. Le président Sauzet enjoignit aux personnes étrangères à la Chambre de se retirer. La princesse quitta lentement l’hémicycle ; mais, soit ambition, soit amour maternel, résolue à soutenir, au milieu des périls, les droits de son fils, elle refusa de sortir, monta par les degrés du centre au sommet de l’amphithéâtre, et là, dépliant un papier, elle essaya de parler. Cette femme petite et si pâle dans ses longs voiles de veuve, pouvait surprendre les cœurs, elle n’avait rien pour dominer les masses humaines. On ne l’entendit pas, on la voyait à peine au milieu des groupes tumultueux, pressés autour d’elle. Tout à coup, une rumeur formidable