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Page:Anatole France - Le Petit Pierre.djvu/186

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moi, buter comme un homme ivre, porter la main sur sa poitrine et s’abattre la tête la première. Il avait été tué d’une balle au cœur. Et, malgré ma frayeur, je fis réflexion que c’était vite fait de mourir. Mais on n’y prenait pas garde, en ce moment, et deux femmes venaient de tomber sur la promenade. J’arrivai en rasant les murs à la maison, et trouvai à la porte un canonnier parisien qui venait nous demander du bois pour rougir les boulets. « Il fait chaud », me dit-il pour rire, car le vent soufflait en tempête et l’on sentait l’aigreur des premiers froids.

» Je lui dis : « Venez prendre du bois. » Mais voilà que la fille Chappedelaine accourt et me crie : « Ne lui donne point de bois, Marie. Les faubourgs ne brûlent-ils déjà point assez ? Et n’y a-t-il point assez de chrétiens grillés comme des pourceaux ? On les sent d’ici ! Si tu donnes du bois, tu en recevras ta digne récompense. Quand les Vendéens seront entrés, ils te feront mourir. » C’était la peur qui la faisait parler ainsi et l’intérêt, car il y avait des riches dans la ville qui payaient pour faire entrer les brigands. Je lui répondis : « Mathilde, sache bien que ces Messieurs, s’ils prennent la ville,