Page:Anatole France - Le Petit Pierre.djvu/241

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sauve à la condition qu’il criât : « Vive le roi », cria : « Vive la République » et tomba percé de vingt coups de baïonnette. Je ne le sais ni ne pourrai jamais le savoir. Mais je sais que l’image de cet enfant, qui fait à la liberté le don de sa vie encore dans sa fleur, met des larmes dans les yeux et des flammes dans les cœurs, et qu’on ne peut imaginer un plus parfait symbole du sacrifice. Je sais aussi, je sais surtout que, lorsque le sculpteur David me montre cet enfant, dans sa nudité charmante et pure, s’abandonnant à la mort avec la sérénité de l’amazone blessée du Vatican, sa cocarde pressée sur son cœur et, dans sa main glacée, une baguette du tambour sur lequel il battait la charge, le miracle est accompli, le jeune héros est créé, Bara vit, Bara est immortel.