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Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/246

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matinales, que le vieillard Océanus mène par les montagnes et qui reçoivent dans leurs bras frais, sur un lit d’hyacinthes et d’anémones, les dieux maîtres du monde, et les bergers aimés des déesses. Car il est des bergers que leurs mères firent beaux et dignes du lit des nymphes, habitantes des sources et des bocages.

» Et moi-même, qui ai beaucoup étudié les curiosités naturelles, voyant tout à l’heure ces nuées se couler voluptueusement au ventre du coteau, j’en concevais des désirs, dont je ne sais rien, sinon qu’ils naissaient vers mes lombes, et que, ainsi qu’Hercule enfant, ils montraient leur force dès le berceau. Et ces désirs n’étaient point que de vapeurs rosées et de nuées légères : ils me représentaient précisément une fille nommée Mona Libetta, que j’ai connue en passant à Castro, dans une auberge où elle était servante et toute au bon plaisir des muletiers et des soldats.

» Et l’image que je me faisais de Mona Libetta, ce matin, en cheminant sur les rampes de la colline, était merveilleusement embellie par la douceur du souvenir et le regret de l’absence, et elle était parée de toutes les illusions, qui,