Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/247

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naissant en l’endroit des lombes que je t’ai dit, répandent ensuite leur feu parfumé dans toute l’âme du corps, et la pénètrent d’ardeurs languissantes et de souffrances délicieuses.

» Car il faut que tu saches, ô Giovanni, qu’à la voir tranquillement et d’un œil froid, cette fille n’était pas bien différente de toutes celles qui, dans les campagnes d’Ombrie et des Romagnes, vont au pré traire les vaches. Elle avait des yeux noirs, lents et farouches, le visage brun, la bouche grande, la poitrine lourde, le ventre jaune et le devant des jambes, à partir du genou, hérissé de poils. Elle riait ordinairement d’un rire épais ; mais, dans le plaisir, sa face devenait sombre et comme étonnée par la présence d’un dieu. C’est là ce qui m’avait attaché à elle, et j’ai beaucoup médité depuis sur la nature de cet attachement, car je suis docteur et habile à chercher les raisons des choses.

» Et j’ai découvert que la force qui m’attirait vers cette Mona Libetta, servante d’auberge à Castro, était la même qui gouverne les astres dans le ciel, et qu’il n’y a qu’une force au monde, qui est l’amour, laquelle est aussi la