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Page:Anatole France - Le Puits de sainte Claire.djvu/74

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Ayant dit, il sauta par-dessus les tombes et se retira tranquillement. Ils se regardèrent l’un l’autre, stupéfaits. Puis, éclatant de rire, ils donnèrent de l’éperon à leurs chevaux. Pendant qu’ils galopaient sur le chemin de Peretola, Messer Bocca dit à Messer Betto :

— Vous ne douterez plus que ce Guido ne soit devenu fou. Il nous a dit que nous étions chez nous dans le cimetière. Et pour tenir un tel propos il faut être hors de raison.

— Il est vrai, répondit Messer Betto, que je ne conçois pas ce qu’il a voulu nous faire entendre en parlant de la sorte. Mais il a coutume de s’exprimer obscurément, par subtiles paraboles. Il nous a jeté là un os qu’il faudrait ouvrir pour en trouver la moelle.

— Pardieu ! s’écria Messer Giordano, je donne à mon chien cet os et le païen qui l’a jeté.

Ils atteignirent bientôt le ruisseau de Peretola, d’où l’on voit les grues s’élever en troupes à la pointe du jour. Pendant la chasse, qui fut abondante, Messer Betto Bruneleschi ne cessait de se remémorer les paroles de Guido. Et, à force d’y songer, il en découvrit le sens. Il appela à grands cris Messer Bocca :