Page:Anatole France - Les Contes de Jacques Tournebroche.djvu/104

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de montrer meurdriers, soudards, paillards, drilles, conquérants et larrons, besongnant de façon orde et mauuaise, et poures diables chus dans la poussière que ilz avalent à plein gosier et vn malchancheux estendu et taschant à se redresser mais ne le pouuant pour ce que le sabot d’un cheual lui pèse sur les mandibules, et cettuy qui regarde bien piteusement que son pennon luy a esté abattu et la main auec, autant il est soubtil et quasi céleste de faire paraistre blandices, caresses, mignardises, charitez et vénustez et les amours des nymphes auec les faunes dans les bois. Et disoit qu’il n’y auoit point de mal en ces corps nudz, assez vestus de grace et de beaulté.

Et auoit en son cabinet, ledict Philémon, vne paincture bien merueilleuse où l’on voyoit vn ieune Faune qui, tirant d’une main cauteleuse vn légier drappeau, descouvroit le ventre d’vne nymphe endormie. Estoit visible que il y prenoit plaisir et sembloit dire : « Le corps de cette ieune déesse est tant doulx et affraichissant que la source qui coule dans l’vmbre de la forest ne l’est point dauantage. Que vous