Page:Anatole France - Les Désirs de Jean Servien.djvu/117

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folie. M. Servien voyait avec inquiétude son fils, inexact, distrait, hagard, rentrer tard dans la nuit et se lever à peine à midi. Sous le regard muet du père, le fils baissait les yeux. Mais sa vie n’était plus dans la maison, elle était tout entière là-bas, près de l’inconnue, dans des régions qu’il imaginait éclatantes de poésie, de richesse et de volupté.

Il retrouvait parfois, à un coin de rue, le marquis Tudesco qui ne parvenait pas à remplacer son gilet de toile à matelas et qui, d’ailleurs, conseillait à Jean d’adresser ses vœux à des demoiselles de magasin.

Quand vint l’été, les affiches de théâtre annoncèrent coup sur coup Mithridate, Adrienne Lecouvreur, Rodogune, les Enfants d’Edouard, la Fiammina. Jean, ayant obtenu le prix de sa place par ruse, par mensonge, en exploitant sa tante ou en glissant les doigts dans la