Page:Anatole France - Les Désirs de Jean Servien.djvu/96

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« J’ai voulu ce qu’elle avait voulu. Elle n’était plus là, Jean, et quand la parole d’un mort vous remonte aux oreilles et vous dit : « J’ordonne pour le bien », il faut obéir. Je m’y suis pris comme j’ai pu, mais sans doute que Dieu était avec moi, puisque j’ai réussi. Te voilà instruit, c’est bon ! mais il ne faut pas que ce qui est fait pour le bien tourne pour le mal. Le mal, c’est l’oisiveté. J’ai travaillé comme une bête de somme et j’ai, du matin au soir, la bricole au cou, donné de fameux coups de collier. Je me rappelle particulièrement un train de cartonnages pour la maison Pigoreau qui me tint debout pendant trente-six heures consécutives. Et cette année-ci encore, pour payer tes examens, j’ai accepté une commande dans le genre anglais qui m’a donné une peine terrible parce que ce n’est pas mon genre à moi et qu’à mon âge on n’est pas bon pour faire du nouveau. Ils voulaient