Page:Anatole France - Les Désirs de Jean Servien.djvu/97

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une façon légère, avec un carton souple comme du papier. J’en ai pleuré, mais j’ai réussi. C’est un fameux outil, que la main d’un ouvrier ! Mais le cerveau d’un homme instruit est un outil bien plus merveilleux encore, et celui-là tu l’as, grâce à Dieu d’abord, à ta mère ensuite. C’est elle qui a eu l’idée de t’instruire, je n’ai fait que suivre cette idée. Ta besogne sera plus douce que la mienne, mais il faudra que tu la fasses. Je suis pauvre, tu le sais ; mais je serais riche que je ne te donnerais pas les moyens de vivre sans rien faire, parce que ce serait te donner des vices et de la honte. Ah ! si je savais que ton instruction t’eût fait prendre le goût de la paresse, je regretterais de n’avoir pas fait de toi un ouvrier comme moi. Mais je suis certain que tu as du cœur ; tu n’as pas encore pris ton élan : voilà tout ! Les commencements seront durs ; M. Bargemont l’a