Page:Anatole France - Les Opinions de Jérôme Coignard.djvu/196

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l’insolente égalité des saturnales qui cesse, la séance levée, lorsque M. l’évêque monte dans son carrosse, laissant M. Duclos crotter ses bas de laine dans le ruisseau. Mais s’il ne veut point s’égaler de la sorte à M. l’évêque de Séez, pourquoi fraye-t-il avec la gent jetonnière ? Que ne se met-il dans un tonneau comme Diogène ou, comme moi, dans une échoppe de Saint-Innocent ? C’est seulement dans un tonneau ou dans une échoppe qu’on domine les grandeurs de ce monde. C’est là seulement qu’on est vrai prince et seul seigneur. Heureux qui n’a pas mis son espoir en l’Académie ! Heureux qui vit exempt de craintes et de désirs et qui connaît le néant de

    GODEAU.

    Rien ne sauroit changer le commerce entre nous
    Je suis évêque ailleurs, ici Godeau pour vous.

    M. l’abbé Coignard vivait sous l’ancien régime. En ce temps-là on disait que l’Académie française avait le mérite d’établir entre tous ses membres une égalité qu’ils ne trouvaient pas devant la loi. Pourtant elle fut détruite en 1793 comme « le dernier refuge de l’aristocratie. »