Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/188

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» Si la foule a longtemps résisté à la vérité pressante, c’est ce dont il ne faut pas s’étonner : on ne doit s’étonner de rien. Il y a des raisons à tout. C’est à nous de les découvrir. Dans le cas présent, il n’est pas besoin de beaucoup de réflexion pour s’apercevoir que le public a été trompé autant qu’on peut l’être, et qu’on a abusé de sa crédulité touchante. La presse a beaucoup aidé au succès du mensonge. Le gros des journaux s’étant porté au secours des faussaires, les feuilles ont publié surtout des pièces fausses ou falsifiées, des injures et des mensonges. Mais il faut reconnaître que, le plus souvent, c’était pour contenter leur public et répondre aux sentiments intimes du lecteur. Et il est certain que la résistance à la vérité vint de l’instinct populaire.

» La foule, j’entends la foule des gens incapables de penser par eux-mêmes, ne comprit pas ; elle ne pouvait pas comprendre. La foule se faisait de l’armée une idée