Page:Anatole France - M. Leconte de Lisle à l’Académie française, paru dans Le Temps, 27 mars 1887.djvu/17

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dans les pays lointains et dans les âges reculés ? Il y trouve le mystère et l’étrangeté, dont il a tant besoin, car il n’y a de poésie que dans ce que nous ne connaissons pas. Il n’y a de poésie que dans le désir de l’impossible ou dans le regret de l’irréparable.

Celui-là, certes, est un grand poète. Il a au plus haut degré le don du rythme et de l’image. Quant à l’émotion, il la possède sous la forme la plus noble et la plus haute : il est riche en émotions intellectuelles. Il nous trouble avec de pures pensées, et cela n’est point d’un génie médiocre. Mais il y a des émotions plus intimes et plus douces. Celles-là, quoi qu’on dise et quoi qu’il dise, ne sont pas absentes de son œuvre. Je n’aurais pas grand’peine à prouver que parfois M. Leconte de Lisle est un élégiaque. Pour cela, je rappellerais le Manchy :