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Eu, 23 août.

Du haut de la colline de Saint-Laurent, nous découvrons la ville d’Eu, paisiblement couchée dans le creux d’un vallon. Elle est charmante ainsi avec ses toits pointus, ses rues tortueuses et le clocher en charpente de son élégante église. Nous la contemplons dans une sorte de ravissement. C’est qu’aussi la vue à vol d’oiseau d’une jolie ville est un spectacle aimable et touchant, où l’âme se plait. Des pensées humaines montent avec la fumée des toits. Il y en a de tristes, il y en a de gaies ; elles se mêlent pour inspirer toutes ensemble une tristesse souriante, plus douce que la gaieté. On songe :

« Ces maisons, si petites au soleil que je puis les cacher toutes en étendant seulement la main, ont pourtant abrité des siècles d’amour et de haine, de plaisir et de souffrances. Elles gardent des secrets terribles, elles en savent long sur la vie et la mort. Elles nous diraient des choses à pleurer et à rire, si les pierres parlaient. Mais les pierres parlent à ceux qui savent les enten-