Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/50

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de mitraille et un air de tranquillité. Ah ! s’ils ne l’avaient pas trahi !… Mais les blancs sont tous des fripons. »

Il se versa à boire. Mme Mathias sortit de sa muette contemplation et, se levant :

« Il faut que je m’en aille, à cause du petit. »

Puis, tirant de sa poche deux pièces de vingt sous, elle les glissa dans la main de l’écrivain public qui les reçut avec un air de superbe indifférence.

Quand nous fûmes dehors, je demandai qui était ce monsieur. Mme Mathias me répondait avec un accent d’orgueil et d’amour :

« C’est Mathias, mon petit, c’est Mathias !

— Mais papa et maman disent qu’il est mort. »

Elle secoua la tête joyeusement.

« Oh ! il m’enterrera et il en enterrera bien d’autres après moi, des vieux et des jeunes. »

Puis elle devint soucieuse :

« Pierre, ne va pas dire que tu as vu Mathias. »