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Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/89

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pierres éloquentes, le sentiment que Paris ne manquera jamais à sa vocation.

Convenons que, sans doute, puisque la Seine est le vrai fleuve de gloire, les boîtes de livres étalées sur les quais lui faisaient une digne couronne.

Je viens de relire l’excellent livre que M. Octave Uzanne a consacré aux antiquités et illustrations des bouquinistes. On y voit que l’usage d’étaler des livres sur les parapets remonte pour le moins au XVIIe siècle, et qu’à l’époque de la Fronde les rebords du Pont-Neuf étaient meublés de romans. MM. les libraires jurés, ayant boutique et enseigne peinte, ne purent souffrir ces humbles concurrents, qui furent chassés par édit, en même temps que le Mazarin, ce qui montre que les petits ont leurs tribulations comme les grands.

Du moins les bouquinistes furent-ils regrettés des doctes hommes, et l’on conserve le mémoire qu’un bibliophile rédigea en leur faveur, l’an 1697, c’est-à-dire plus de quarante ans après leur expulsion.

« Autrefois, dit ce savant, une bonne partye des boutiques du Pont-Neuf estoient occupées par les librairies qui y portoient de très bons