Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/167

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la défense de l’orthodoxie, rayait le nom de François Rabelais de tous ses écrits. Mais notre auteur gardait encore de puissants protecteurs, les évêques de Paris, du Mans, de Tulle, de Montpellier, le cardinal de Châtillon, et le Pantagruel passait, bien à tort il est vrai, pour une bouffonnerie sans conséquence. Il semble bien, après les recherches heureuses de M. Henri Clouzot, que Maître François se soit très tranquillement installé dans la maison que le seigneur de Saint-Ay avait dans la ville de Metz.

De là, il écrivit au cardinal du Bellay une très humble supplique pour obtenir de lui un peu d’argent.

« Si vous n’avez de moi pitié, lui dit-il, je ne sais que devenir. Sinon en dernier désespoir m’asservir à quelqu’un de par deçà, avec dommage et perte évidente de mes études. »

Il proteste qu’il est impossible de vivre plus frugalement qu’il ne fait. Tout ce qu’il demande, c’est de pouvoir « vivoter » et s’entretenir honnêtement, comme il a fait jusque-là, pour l’honneur de la maison à laquelle il appartenait lors de sa sortie de France.

Cette lettre est très humble, sans doute, mais elle est surtout comminatoire. Maître François, docteur en médecine, dit poliment au cardinal évêque : « Si vous me continuez mes subsides, je reste à vous ; si vous ne me les continuez pas, je me donne à un autre, ainsi que le veulent mon