Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/189

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui semblait, et qu’il n’espérât rien de sa sacristie, car sûrement il n’en aurait rien.

» Villon rapporta aux acteurs cet entretien en grande indignation, ajoutant que Dieu ferait de Tappecoue vengeance et punition exemplaire bientôt.

» Le samedi suivant, Villon eut avis que Tappecoue, sur la pouliche du couvent, était allé faire la quête à Saint-Ligaire et qu’il serait de retour sur les deux heures après midi. Or donc il passa en revue les acteurs de la diablerie dans la ville et sur le marché. Ses diables étaient tout caparaçonnés de peaux de loups, de veaux et de béliers passementées de têtes de mouton, de cornes de bœufs et de grands crochets de cuisine ; ceints de grosses courroies desquelles pendaient de grosses cymbales de vaches et des sonnettes de mulets à bruit horrifique. Certains tenaient à la main des bâtons noirs pleins de fusées ; d’autres portaient de longs tisons allumés, sur lesquels, à chaque carrefour, ils jetaient à pleines poignées de la résine en poudre, dont il sortait un feu et une fumée terribles.

» Les ayant ainsi conduits à la joie du peuple et à la grande frayeur des petits enfants, finalement il les mena banqueter en une cassine (c’est-à-dire une auberge de campagne, une guinguette) hors des murs de la ville, sur le chemin de Saint-Ligaire. Arrivés à la cassine, ils aperçoivent de loin Tappecoue, qui retournait de sa quête.