Page:Anatole France - Thaïs.djvu/100

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maître et des dieux de l’empire. L’accusation était sans preuves et l’esclave la repoussait de toutes ses forces. Il n’en fut pas moins traîné devant le tribunal et, comme il passait pour un mauvais serviteur, le juge le condamna au dernier supplice.

— Tes mains, lui dit-il, dont tu n’as pas su faire un bon usage, seront clouées au poteau.

Ahmès écouta paisiblement cet arrêt, salua le juge avec beaucoup de respect et fut conduit à la prison publique. Durant les trois jours qu’il y resta, il ne cessa de prêcher l’Évangile aux prisonniers et l’on a conté depuis que des criminels et le geôlier lui-même, touchés par ses paroles, avaient cru en Jésus crucifié.

On le conduisit à ce carrefour qu’une nuit, moins de deux ans auparavant, il avait traversé avec allégresse, portant dans son manteau blanc la petite Thaïs, la fille de son âme, sa fleur bien-aimée. Attaché sur la croix, les mains clouées, il ne poussa pas une plainte ; seulement il soupira à plusieurs reprises : « J’ai soif ! »

Son supplice dura trois jours et trois nuits. On n’aurait pas cru la chair humaine capable