Page:Anatole France - Thaïs.djvu/108

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l’autre des paroles qu’on ne dit qu’aux enfants. Le soir, ils se promenaient sur les bords solitaires de l’Oronte et se perdaient dans les bois de lauriers. Parfois ils se levaient dès l’aube pour aller cueillir des jacinthes sur les pentes du Silpicus. Ils buvaient dans la même coupe, et, quand elle portait un grain de raisin à sa bouche, il le lui prenait entre les lèvres avec ses dents.

Moeroé vint chez Lollius réclamer Thaïs à grands cris :

— C’est ma fille, disait-elle, ma fille qu’on m’arrache, ma fleur parfumée, mes petites entrailles !…

Lollius la renvoya avec une grosse somme d’argent. Mais, comme elle revint demandant encore quelques staters d’or, le jeune homme la fit mettre en prison, et les magistrats, ayant découvert plusieurs crimes dont elle s’était rendue coupable, elle fut condamnée à mort et livrée aux bêtes.

Thaïs aimait Lollius avec toutes les fureurs de l’imagination et toutes les surprises de l’innocence. Elle lui disait dans toute la vérité de son cœur :