Page:Anatole France - Thaïs.djvu/143

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tous ; son éloquence est terrible. Si Marcus est le Platon des chrétiens, Paphnuce est leur Démosthène. Épicure, dans son petit jardin, n’entendit jamais rien de pareil.

Cependant Philina et Drosé dévoraient Thaïs des yeux. Elle portait dans ses cheveux blonds une couronne de violettes pâles dont chaque fleur rappelait, en une teinte affaiblie, la couleur de ses prunelles, si bien que les fleurs semblaient des regards effacés et les yeux des fleurs étincelantes. C’était le don de cette femme : sur elle tout vivait, tout était âme et harmonie. Sa robe, couleur de mauve et lamée d’argent, traînait dans ses longs plis une grâce presque triste, que n’égayaient ni bracelets ni colliers, et tout l’éclat de sa parure était dans ses bras nus. Admirant malgré elles la robe et la coiffure de Thaïs, ses deux amies ne lui en parlèrent point.

— Que tu es belle ! lui dit Philina. Tu ne pouvais l’être plus quand tu vins à Alexandrie. Pourtant ma mère qui se souvenait de t’avoir vue alors disait que peu de femmes étaient dignes de t’être comparées.

— Qui est donc, demanda Drosé, ce nouvel