Page:Anatole France - Thaïs.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

livrer au fond du désert à des austérités inouïes, à des travaux singuliers, à des œuvres très neuves. Mais avant d’accomplir son dessein, il se rendit auprès du vieillard Palémon, afin de lui demander conseil.

Il le trouva qui, dans son jardin, arrosait ses laitues. C’était au déclin du jour. Le Nil était bleu et coulait au pied des collines violettes. Le saint homme marchait doucement pour ne pas effrayer une colombe qui s’était posée sur son épaule.

— Le Seigneur, dit-il, soit avec toi, frère Paphnuce ! Admire sa bonté : il m’envoie les bêtes qu’il a créées pour que je m’entretienne avec elles de ses œuvres et afin que je le glorifie dans les oiseaux du ciel. Vois cette colombe, remarque les nuances changeantes de son cou, et dis si ce n’est pas un bel ouvrage de Dieu. Mais n’as-tu pas, mon frère, à m’entretenir de quelque pieux sujet ? S’il en est ainsi, je poserai là mon arrosoir et je t’écouterai.

Paphnuce conta au vieillard son voyage, son retour, les visions de ses jours, les rêves de ses nuits, sans omettre le songe criminel et la foule des chacals.