Page:Anatole France - Thaïs.djvu/262

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son trouble et de sa damnation. Il descendit à la hâte tous les degrés et toucha le sol. Ses pieds avaient oublié la terre ; ils chancelaient. Mais sentant sur lui l’ombre de la colonne maudite, il les forçait à courir. Tout dormait. Il traversa sans être vu la grande place entourée de cabarets, d’hôtelleries et de caravansérails et se jeta dans une ruelle qui montait vers les collines libyques. Un chien, qui le poursuivait en aboyant, ne s’arrêta qu’aux premiers sables du désert. Et Paphnuce s’en alla par la contrée où il n’y a de route que la piste des bêtes sauvages. Laissant derrière lui les cabanes abandonnées par les faux monnayeurs, il poursuivit toute la nuit et tout le jour sa fuite désolée.

Enfin, près d’expirer de faim, de soif et de fatigue, et ne sachant pas encore si Dieu était loin, il découvrit une ville muette qui s’étendait à droite et à gauche et s’allait perdre dans la pourpre de l’horizon. Les demeures, largement isolées et pareilles les unes aux autres, ressemblaient à des pyramides coupées à la moitié de leur hauteur. C’étaient des tombeaux. Les portes en étaient brisées et l’on voyait