Page:Anatole France - Thaïs.djvu/36

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Le vieillard répliqua :

— Il est vain d’agir ou de s’abstenir ; il est indifférent de vivre ou de mourir.

— Eh quoi ! demanda Paphnuce, tu ne désires pas vivre dans l’éternité ? Mais, dis-moi, n’habites-tu pas une cabane dans ce désert à la façon des anachorètes ?

— Il paraît.

— Ne vis-tu pas nu et dénué de tout ?

— Il paraît.

— Ne te nourris-tu pas de racines et ne pratiques-tu pas la chasteté ?

— Il paraît.

— N’as-tu pas renoncé à toutes les vanités de ce monde ?

— J’ai renoncé en effet aux choses vaines qui font communément le souci des hommes.

— Ainsi tu es comme moi pauvre, chaste et solitaire. Et tu ne l’es pas comme moi pour l’amour de Dieu, et en vue de la félicité céleste ! C’est ce que je ne puis comprendre. Pourquoi es-tu vertueux si tu ne crois pas en Jésus-Christ ? Pourquoi te prives-tu des biens de ce monde, si tu n’espères pas gagner les biens éternels ?