Page:Anatole France - Thaïs.djvu/77

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nécessité et parce que je veux mourir. Fille de Priam et sœur d’Hector, ma couche, autrefois jugée digne des rois, ne recevra pas un maître étranger. Je renonce librement à la lumière du jour.

Hécube, inerte dans la poussière, se releva soudain et s’attacha à sa fille d’une étreinte désespérée. Polyxène dénoua avec une douceur résolue les vieux bras qui la liaient. On croyait l’entendre :

— Mère, ne t’expose pas aux outrages du maître. N’attends pas que, t’arrachant à moi, il ne te traîne indignement. Plutôt, mère bien aimée, tends-moi cette main ridée et approche tes joues creuses de mes lèvres.

La douleur était belle sur le visage de Thaïs ; la foule se montrait reconnaissante à cette femme de revêtir ainsi d’une grâce surhumaine les formes et les travaux de la vie, et Paphnuce, lui pardonnant sa splendeur présente en vue de son humilité prochaine, se glorifiait par avance de la sainte qu’il allait donner au ciel.

Le spectacle touchait au dénouement. Hécube tomba comme morte et Polyxène, con-