Page:Anatole France - Vie de Jeanne d’Arc, 1908, tome 1.djvu/32

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J’ai dit, dans cet ouvrage, à propos du procès de réhabilitation, ce qu’il faut penser des dépositions des greffiers, de l’huissier Massieu, du frère Isambard de la Pierre, du frère Martin Ladvenu[1] et de tous ces brûleurs de sorcières et vengeurs de Dieu, qui travaillèrent à la réhabilitation d’aussi bon cœur qu’ils avaient travaillé à la condamnation.

Dans bien des cas, au sujet d’événements considérables, les témoins parlent tout à fait à l’encontre de la réalité. Un marchand drapier d’Orléans, nommé Jean Luillier, vient devant les commissaires, hardi comme l’archer de Bagnolet, et déclare que les habitants ni la garnison ne pouvaient résister contre les ennemis assemblés en si grand nombre[2]. Or, sur ce point important il est démenti par les documents les plus sûrs, qui établissent que les Anglais étaient au contraire bien faibles et bien dénués autour d’Orléans[3].

Si les témoignages du second procès sentent souvent l’artifice et l’apprêt, s’ils sont parfois hors de toute vérité, ce n’est pas seulement le tort de ceux qui les portèrent ; c’est aussi le tort de ceux qui les reçurent. Ceux-ci les avaient sollicités avec trop d’art. Ces témoignages

  1. Procès, t. II, pp. 15, 161, 329 ; t. III, pp. 41 et passim.
  2. lbid., t. III, p. 23.
  3. L. Jarry, Le compte de l’armée anglaise au siège d’Orléans (14281429). Orléans, 1892, in-8.,