Page:Anatole France - Vie de Jeanne d’Arc, 1908, tome 1.djvu/50

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  Tandis que les gens d’armes et tout le commun peuple l’accueillaient comme la Pucelle de Dieu et l’ange envoyé du ciel pour le salut du royaume, ces bons seigneurs ne songeaient qu’à profiter des sentiments de confiance qu’elle inspirait et qu’ils ne partageaient guère. La voyant ignorante au possible et la jugeant, sans doute, moins intelligente qu’elle n’était, ils entendaient la conduire à leur idée. Ils durent bientôt s’apercevoir que ce n’était pas toujours facile. Elle était une sainte ; les saintes sont intraitables. Quels furent au vrai les rapports du Conseil royal avec la Pucelle ? Nous l’ignorons et c’est un secret qui ne sera jamais pénétré. Les juges de Rouen croyaient savoir qu’elle recevait des lettres de saint Michel[1]. Il est possible qu’on ait abusé quelquefois de sa simplicité. Nous avons des raisons de croire que la marche sur Reims ne lui fut pas suggérée en France ; mais il est certain que le chancelier du royaume, messire Regnault de Chartres, archevêque de Reims, avait grande envie d’être rétabli sur le siège du bienheureux Rémi et de jouir de ses bénéfices.

 Dans le fait, cette campagne du sacre ne fut qu’une suite de négociations appuyées par des lances. On voulut montrer aux bonnes villes un roi saint et pacifique.

  1. Procès, t. I, p. 146.