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Page:Anatole France - Vie de Jeanne d’Arc, 1908, tome 1.djvu/56

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aveuglément obéi à la Pucelle. Ce n’est point tout à fait le conseil que l’archevêque d’Embrun donnait, sur le moment, au roi Charles ; il lui recommandait au contraire de ne point se départir des moyens inspirés par la prudence humaine[1].

  On a beaucoup répété que les seigneurs et capitaines, particulièrement le vieux Gaucourt[2], étaient jaloux d’elle. Il faut, pour le croire, ignorer profondément la nature humaine. Ils étaient envieux les uns des autres, et c’est cette envie, au contraire, qui, mieux que tout autre sentiment, leur fit souffrir que la Pucelle se dît chef de guerre.

 J’avoue qu’il m’a été impossible de découvrir les sourdes intrigues des conseillers du roi et des capitaines conjurés pour perdre la sainte. Elles éclatent aux yeux de plusieurs historiens ; pour moi, j’ai beau faire : je ne les discerne pas. Le chambellan, sire de la Trémouille, n’était pas une belle âme et le chancelier Regnault de Chartres avait le cœur très sec ; mais ce qui m’apparaît, c’est que le sire de la Trémouille refusa de céder cette précieuse fille au duc d’Alençon qui la lui demandait et que le chancelier la garda pour s’en servir. Je ne crois pas du tout que

  1. Le R. P. M. Former, Histoire des Alpes-Maritimes, Paris, 1890, in-8°, t. II, p. 324. — Lanéry d’Arc, Mémoires et consultations, pp. 565 et suiv.
  2. Marquis de Gaucourt, Le sire de Gaucourt, Orléans, 1855, in-8°