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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/258

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pareil tour de force, il fallait un gouvernement autocratique, maître de mener des élections comme un recensement ou une levée militaire. Cette première création d’Alexandre III, qui ajoutait un rouage de plus à une administration déjà compliquée, n’a eu du reste que de courtes et inutiles destinées. Accueilli avec un bruyant concert de louanges par une presse désireuse de se leurrer elle-même, ou condamnée pour vivre à tout admirer, ce conseil, qui devait procurer à la police l’appui et le contrôle de la population, a disparu après quelques semaines. Le gouvernement ne l’a pas supprimé, il s’est contenté de ne plus le convoquer. Le maître de police avait trouvé incommode ce bienveillant contrôle. La municipalité, élue selon le système inauguré en 1870, est demeurée la seule représentation de la capitale.

Les réformes d’Alexandre II n’ont encore pu communiquer aux institutions municipales la vie et l’activité dont elles étaient dépourvues sous le régime antérieur. Ce n’est pas seulement que la législation ne possède point le pouvoir d’animer les institutions, c’est que certaines clauses de la loi nouvelle en altèrent ou en détruisent l’efficacité. En changeant le mode d’élection, le statut de 1870 n’a pas beaucoup modifié la composition des conseils municipaux. Certaines villes ont aujourd’hui pour maire un noble ou un ancien fonctionnaire ; mais dans presque toutes la prépondérance est, comme par le passé, demeurée aux classes proprement urbaines, demeurée surtout aux kouptsy, aux marchands.

Dans la plupart des grandes villes, les assemblées municipales comptent, il est vrai, des représentants de toutes les classes, nobles et fonctionnaires, marchands et bourgeois notables, petits bourgeois, artisans et paysans, car, en beaucoup de cités russes, une grande partie de la classe ouvrière est, on le sait, formée de moujiks qui n’en continuent pas moins à rester membres de leur commune natale. Il y a toutefois fort peu de conseils municipaux où