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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/294

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de ces volumes n’offrait rien de définitif ; aussi, malgré leur origine relativement récente, quelques-uns ont-ils été déjà plusieurs fois remaniés, complétés par des suppléments ou remplacés par des recueils nouveaux[1]. Ce code si volumineux est, du reste, loin de comprendre toutes les lois de l’empire : il y a dans certaines provinces, pour certaines affaires civiles ou religieuses, toute une législation spéciale qu’il faut chercher ailleurs. Aussi n’est-il pas facile aujourd’hui même de se reconnaître dans ce chaos. Certaines branches de la législation, celle qui touche les Juifs par exemple, sont toujours un véritable dédale. Il faut être un spécialiste pour ne pas s’y perdre. Bref, les lois sont souvent restées si confuses et compliquées que le pays ne sait trop ce qu’on lui promet, quand on lui fait espérer le règne des lois[2].

Le gouvernement impérial comprend les inconvénients de cette complication des lois ; aussi n’a-t-il pas renoncé à doter la Russie de codes réguliers et systématiques analogues à notre code Napoléon. Alexandre II avait, sur la fin de son règne, entrepris la rédaction d’un nouveau code pénal, dont il a légué l’achèvement à son successeur. Alexandre III a, en 1882, chargé une commission d’élaborer un projet de code civil ; mais c’est là, pour les lois

  1. En y ajoutant les suppléments, la collection se compose de 40 volumes, d’au moins 100 000 articles. La première édition du Svod est de 1657 ; il en a été publié une édition revue et corrigée en 1876 ; on en a commencé une nouvelle en 1886. L’édition de 1876 supprime près de 20 000 articles et en ajoute une douzaine de mille. Malgré ces corrections il y a encore un grand nombre de répétitions ; on affirme que certains articles se répètent jusqu’à dix fois.
  2. Nous n’avons point à parler dans cet ouvrage du droit civil russe, nous en avons donné quelques traits essentiels en étudiant les classes sociales, tome I, livres V et VI. Nous sommes heureux de pouvoir, à cet égard, renvoyer le lecteur français à l’un de nos anciens compatriotes d’Alsace, aujourd’hui professeur à Lausanne, M. E. Lehr : Éléments du droit civil russe, Plon, 1877. La Pologne est encore en possession du code Napoléon, et les provinces baltiques de leurs vieilles lois germaniques ; mais, sous prétexte de régularité et d’unité, il est question d’abroger toutes ces différences, au risque de soumettre les sujets de la Russie à des lois manifestement inférieures et en désaccord avec leurs mœurs.