Aller au contenu

Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 2, Hachette, 1893.djvu/421

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nement heures, n’étaient pas faits pour éclairer l’autorité sur l’orgaaisation de ses adversaires. Aussi, chaque fois qu’il ne s’est pas laissé aller aux premiers emportements de la colère, le gouvernement en est-il revenu aux grands procès à longue enquête. Ici, comme en tout, il n’a pas su avoir de règle uniforme ni de système suivi. Les prévenus politiques sont, selon les circonstances, solon l’importance de l’affaire ou l’inspiration du moment, jugés par une cour martiale ou par une commission judiciaire. Les oukazes d’Alexandre III sur l’état de protection renforcée ou extraordinaire se résument à donner en cette matière un blancseing à l’administration.

Quels que soient les juges auxquels le gouvernement défère ses ennemis, on ne peut se défendre de remarquer que tous ces tribunaux d’exception ont assez mal répondu aux espérances de leurs promoteurs. Ce ne sont ni les conseils de guerre ni les commissions sénatoriales qui ont découragé les conspirateurs. Pour échapper aux attentats, Alexandre III a dû longtemps se condamner à des précautions sans exemple depuis Louis XI ou Ivan le Terrible. Il est douteux que la sécurité du souverain ait beaucoup gagné à l’abandon des formes judiciaires habituelles. Les tribunaux ordinaires n’eussent guère moins sévèrement frappé les conspirateurs, et l’autorité de leur sentence eût été plus grande. Le jury même qui avait absous Véra Zasoulitch n’eût assurément pas acquitté les assassins du tsar. Ne l’a-t-il pas montré en condamnant des fonctionnaires de la police auxquels on ne pouvait reprocher que de la négligence dans leur service[1] ? Pour la justice, comme

    nement. Les deux assassins du général Strelnikof ont été pendus à Odessa avant qu’on eût pu constater leur identité. Ce n’est que plus tard qu’on a découvert que l’un d’eux, Khaltourine, avait été le principal auteur de l’explosion du Palais d’hiver en 1880.

  1. Procès du général Mrovinsky et des deux conseillers d’État Téglef et Foursor, condamnés à la déportation dans la province d’Arkhangel, pour n’avoir pas découvert la mine creusée à Pétersbourg par les révolutionnaires dans la Petite Sadovaïa.