Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/139

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c’est que toute cette jeunesse, heureuse d’espérer, ne pensait pas le moins du monde à l’argent.

C’était encore le temps où l’on n’y pensait guère chez les artistes et chez les écrivains. Il y en avait qui étaient arrivés à leur âge mûr, d’autres à la vieillesse, sans y avoir jamais songé ; on le leur reprochait et ils en riaient, car ils étaient heureux d’une vie modeste dont le luxe était le succès de leurs ouvrages et la joie le plaisir du travail. C’était à peine si l’on voyait poindre à l’horizon l’amour de l’or. Seulement deux ou trois auteurs dramatiques étaient soupçonnés d’une avidité qui voulait tout traduire en argent, même la gloire… et on les voyait s’éloigner de leurs confrères, et chercher à leur barrer le chemin avec une impitoyable habileté. Mais jusque-là les littérateurs avaient aimé la littérature et s’étaient aidés mutuellement. Il en était ainsi sous la Restauration, où s’épanouirent tant de poétiques talents d’un ordre élevé. Lorsque les arts et les lettres sont une noble passion qui porte vers le beau, l’artiste et l’écrivain sont généreux et pleins de sympathies pour ceux dont les efforts tendent aussi à la recherche de l’idéal ; mais, quand l’art est seulement un métier, on veut