Page:Ancelot - Les salons de Paris : foyers éteints.djvu/86

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plus distingués ; sa gloire avait été attaquée, remise en question et même niée par le faux romantisme, qui triomphait alors. On affectait d’oublier ses derniers chefs-d’œuvre et ses derniers succès : la Peste de Marseille (1832), le Sacre de Charles X (1829) et Louis XIV déclarant son petit-fils roi d’Espagne (1828). Gérard en souffrait ; on a beau avoir la conscience de son talent ou de sa vertu, si chaque matin on voit imprimer qu’on est stupide et méchant, on finit par douter de soi, surtout avec cette âme pleine de susceptibilités qui est celle des grands esprits, car ils n’ont si bien tout reproduit que parce qu’ils ont senti vivement toutes les choses de la vie.

Gérard, grâce à cette espèce de débordement de l’envie qui eut lieu vers cette époque, acheva péniblement sa belle et noble carrière ; il se joignit à ses peines morales des souffrances physiques, et, ce qu’il y a de plus cruel, des souffrances qui lui enlevaient la possibilité du travail : la goutte faisait trembler sa main, et ses yeux ne voyaient plus distinctement les objets. Sa pensée seule restait intacte, mais c’était une lumière qui n’éclairait plus que des ruines, et qui lui faisait mieux