Page:Andersen - Nouveaux Contes, trad. Soldi.djvu/217

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— Vous me connaissez donc ? dit-il à l’étranger.

— Sans doute, et de plus je suis constructeur de moulins.

— Constructeur de moulins ?

— Comme tu dis, et je me ferais fort de te construire un moulin bien supérieur à tous ceux qu’il y a par ici.

— Je n’ai pas d’argent, soupira le meunier.

— La difficulté n’est pas là, répliqua l’étranger en souriant d’un air goguenard : donne-moi seulement ton âme en gage, et, pendant douze ans, tout ce que tu entreprendras te réussira ; tu deviendras plus riche que tous tes voisins.

Le malheureux frissonna de la tête aux pieds. Il avait compris à qui il avait affaire. Cependant la perspective de douze années de prospérité ne pouvait manquer de produire sur lui une vive et puissante impression. Il voyait déjà sa femme et ses enfants riches et heureux.

— Quelle garantie aurais-je de mon côté de la vérité de vos paroles ? dit-il timidement.

L’étranger faisait de si étranges éclats de rire que toute la forêt en retentissait.

— La, la ! dit-il, écris seulement ton nom sur ce papier, et, avant que le coq ait chanté, tu verras à cette place un moulin comme tu n’en as jamais vu, un moulin qui marchera aussi bien par le calme que par le vent ; bref, une machine merveilleuse et qui t’appartiendra en toute propriété.

— Hélas ! qu’en ferais-je ? Je n’ai pas d’argent pour acheter du blé. Et puis, comment vous y prendrez-vous pour l’achever dans une seule nuit ?

— Cela me regarde ; si l’ouvrage n’est pas terminé