Page:Andersen - Nouveaux Contes, trad. Soldi.djvu/229

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dans le salon. Elle portait dans ses mains un objet enveloppé de trois ou quatre grandes feuilles de papier, et pour lequel elle semblait prendre encore plus de précautions que sa mère n’en avait pris pour la branche de pommier. Elle écarta les feuilles tout doucement, et l’on vit apparaître au milieu la tête frêle et gracieuse du pissenlit tant méprisé. La jeune fille en admira longtemps le port élégant, la structure délicate et toute cette beauté si fine que le moindre souffle pouvait détruire.

— Comme elle est jolie ! dit-elle. Je veux la mettre ici, à côté de cette branche de pommier que tout le monde admire si fort : elles ne se ressemblent pas ; mais chacune, dans son genre, est aussi belle que l’autre.

En disant ces mots, elle effleura du bout de ses lèvres la modeste plante, et elle embrassa aussi la branche de pommier. En recevant ce baiser, les feuilles de cette dernière semblèrent rougir, mais c’était de confusion et non de colère. Elle voyait enfin qu’en ne s’en rapportant qu’à soi-même, on s’estimait toujours trop, et les autres trop peu.