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Page:André Léo - Les Enfants de France, 1890.djvu/8

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LES ENFANTS DE FRANCE

Si, par des circonstances exceptionnelles, vous étiez né dans une auberge ? dans une forêt ? dans un antre de bêtes sauvages ? tiendriez-vous ce lieu pour votre patrie ?

Non, n’est-ce pas ?

La patrie, pour l’enfant, tout d’abord c’est le foyer, la famille ; l’abri maternel où sa faiblesse profonde est réchauffée, allaitée, bercée, aimée surtout ; où ses cris font accourir sa mère près de son berceau ; où ses yeux ne rencontrent autour de lui que des objets familiers et des visages amis ; où, constamment secouru, protégé, il s’ÉLÈVE.

Plus tard, quand ses petites jambes, devenues assez fortes, le portent d’elles-mêmes hors de la maison, sa patrie s’étend : outre le foyer chéri, c’est le jardin, avec ses plantes, ses fleurs, ses petites bêtes, certains coins où il se plaît et songe, essayant sa pensée encore indécise, comme il essayait hier ses pas chancelants. C’est la cour et ses habitants poules, poussins, pigeons ; et les canards, ces bateaux vivants qui vont sur l’eau. Ce sont, à la campagne, les grands bœufs, la vache nourricière ; les champs, les chemins, les bois d’alentour ; le vaste ciel, tantôt bleu, tantôt nuageux, couvrant la terre jusqu’au cercle de l’horizon, qui représente à ses yeux enfantins les confins du vaste monde. Enfin, les camarades, les voisins ;