Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/143

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pour entrer dans la mort ; c’est là qu’ils allaient tous deux et ils firent connaissance. La vie et la mort marchaient simultanément sur deux plans, et jusqu’à la fin, jusque dans les détails les plus risibles et les plus stupides, la vie restait la vie.

— Qu’avez-vous fait, vous, Ianson ?

— J’ai frappé mon patron avec un couteau. J’ai volé de l’argent.

D’après le son de sa voix, il semblait que Ianson s’endormait. Werner trouva, dans l’ombre, sa main molle et la serra. Ianson la retira avec indolence.

— Tu as peur ? demanda Werner.

— Je ne veux pas être pendu.

Ils gardèrent le silence. Werner trouva de nouveau la main de l’Estonien et la serra fortement entre ses paumes sèches et brûlantes. Elle resta immobile, et Ianson n’essaya plus de la dégager.

On étouffait dans la voiture trop étroite, qui sentait le renfermé, le drap de soldat, le fumier et le cuir de bottes mouillées. Un jeune gendarme, assis en face de Wer-