Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/154

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ment permet-on à des oiseaux pareils d’égorger les gens ?

Depuis un moment, il examinait Moussia à la dérobée ; soudain, il se tourna vivement et fixa sur elle son regard droit et perçant.

— Mademoiselle ! Hé ! mademoiselle ! Qu’avez-vous donc ? Vos joues sont toutes roses et vous riez ! Regarde, elle rit vraiment ! Regarde ! Regarde ! Et il saisit le genou de Werner de ses doigts crochus.

Rougissante, un peu confuse, Moussia planta ses yeux dans les yeux attentifs et sauvages qui la questionnaient. Tous gardèrent le silence.

Les petits wagons bondissaient sur la voie étroite et couraient avec empressement. À un tournant ou à un passage à niveau, la sirène siffla : le mécanicien avait peur d’écraser quelqu’un. N’était-il pas atroce de penser qu’on apportait tant de soins, d’efforts, en un mot toute l’activité humaine à conduire des hommes à la pendaison ? La chose au monde, la plus insensée, s’accomplissait