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LA VIE D’UN POPE

Maintenant, il était dans l’attente, et se demandait si le pope de Znamenskoié l’avait cru ou non : aussi fut-il content de voir le prêtre pâlir, s’écarter de lui, et lever le poing comme pour le frapper.

— Est-ce vrai ? demanda le père Vassili d’une voix sourde.

Le mendiant se signa rapidement.

— Bien sûr que c’est vrai !… Que je sois écrasé si…

— Alors, sais-tu que c’est l’enfer ! cria le pope. Tu entends, l’enfer !

— Dieu est miséricordieux ! marmotta le mendiant en prenant un air morne et offensé.

Mais à ses yeux, pleins de malice et d’effroi, il était visible pourtant qu’il s’attendait à l’enfer, et que, même, il s’y était déjà accoutumé par avance, comme à son affreuse histoire de petite fille étranglée.

— Sur terre, l’enfer !… après, encore l’enfer !… Où est ton ciel, à toi ? Si tu étais un ver de terre, je t’écraserais du pied… mais tu es un homme, pourtant ! un homme !…