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LA VIE D’UN POPE

ment bombée, les mains ballantes et ouvertes, et laissait pendre en arrière sa longue tête étroite, où le menton court et tronqué faisait une tache blanche.

Dans ce sommeil paisible, sous la pâle lumière réfléchie par le plafond, les paupières fermées recouvrant ses yeux vides de pensée, son visage ne semblait plus aussi effrayant que le jour ; même, il avait l’expression de fatigue d’un acteur épuisé par un rôle difficile, et, autour de sa bouche énorme aux lèvres serrées, se creusait le pli d’une amère tristesse.

On eût dit qu’il avait deux âmes, et que, l’une étant endormie, l’autre s’éveillait, consciente et affligée.

Enfin, la popadia se glissait furtivement jusqu’au lit de son époux et lui signait le front, pour en chasser la tristesse et les mauvaises pensées ; elle aurait voulu lui baiser la main, mais elle n’osait pas et s’en retournait doucement.

Et sa blancheur fondait lentement dans les