Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/38

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hostile et semblait scruter son regard. Ce coin de ciel bleu était la seule chose pure et vraie qu’elle pût regarder avec confiance.

Les juges avaient pitié de Serge Golovine et haïssaient Moussia.

Le voisin de Moussia, immobile aussi, dans une pose un peu affectée, les mains croisées entre les genoux, était un inconnu surnommé Werner. Si l’on peut verrouiller un visage comme une lourde porte, l’inconnu avait verrouillé le sien comme une porte de fer. Il fixait obstinément le plancher et il était impossible de savoir s’il était calme ou profondément ému, s’il pensait à quelque chose ou écoutait les dépositions des agents de police. Sa taille était peu élevée, et ses traits étaient fins et nobles. Il donnait l’impression d’une force immense et calme, d’une vaillance froide et insolente. La politesse même avec laquelle il fournissait des réponses claires et brèves semblait dangereuse sur ses lèvres. Si la capote du prisonnier paraissait être un accoutrement ridicule sur le dos des autres prévenus, par